Le pape François danse avec les loups

A quoi sert de protéger la planète si elle finit par être peuplée de cyborgs qui obéissent au doigt et à l’œil à un pouvoir qui est directement connecté sur leur cerveau ?

« Le pape François danse avec les loups »

La Croix du 31 août 2015

Pénitence ! Repentance ! Décroissance ! Dans un monde sans transcendance, on comprend qu’il est impossible d’imposer quelque limite que ce soit à la liberté de l’homme. La démocratie elle-même confirme cet asservissement du pouvoir législatif à la volonté populaire. Le fait que, dans un pays comme la France, la dette publique égale un an de production montre à quel point les parlementaires sont incapables de résister à la pression de leur électorat. C’est alors qu’entre en scène la double hypothèse d’un réchauffement climatique exponentiel d’une part, de l’origine anthropique de ce réchauffement supposé d’autre part. Les hommes politiques s’en saisissent au travers d’une structure intergouvernementale (GIEC) pour essayer de reprendre le pouvoir sur l’opinion publique.

Pénitence : vous avez épuisé la planète par vos prélèvements inconsidérés. Désormais, il vous faudra modérer vos envies et vous engager dans un mode de consommation plus sobre, rouler moins vite, arrêter le climatiseur, etc. Repentance : en fait, ce sont les pays développés qui ont épuisé les ressources naturelles et saturé l’atmosphère de CO2. Il faut donc qu’ils dédommagent les pays qui n’ont pas connu de développement économique. Décroissance : on ne sait pas très bien ce qu’il y a derrière ce mot, mais il sonne bien. Concrètement, il s’agirait de diminuer le volume de la consommation par tête… ou de diminuer le nombre de têtes !

Un collège d’experts définit une doctrine dont il clame le fondement scientifique. Les hommes politiques la reçoivent pieusement ; ils la transmettent à leurs électeurs dans une rhétorique qui relève surtout de la répétition. Il ne manque plus qu’une liturgie : ce sont les sommets sur le climat. On le voit, après la religion de la progression indéfinie, voici la nouvelle religion de la régression !

A ce stade, on ne voit pas bien pourquoi le pape François a cru devoir intervenir dans le débat au travers de son encyclique Laudato si’. Si l’hypothèse scientifique d’un réchauffement climatique d’origine anthropique se transforme demain en certitude, l’onction spirituelle qu’il donne implicitement à ce qui sera devenu un fait est inutile. Si cette hypothèse scientifique n’est pas vérifiée, on se retrouve avec une sorte d’affaire Galilée à l’envers : l’Eglise catholique, au sommet de sa hiérarchie, prend fait et cause pour une erreur scientifique. D’autant que, a priori, le pape n’a aucun besoin de cette théorie pour prôner une consommation responsable, le respect, voire l’amour de la nature, la solidarité entre tous les vivants : toute l’écriture sainte y conduit ! A moins que son projet ne soit pas celui de la conversion spirituelle de l’homme, mais celui du contrôle politique de sa consommation ! Il faut le dire en effet, dans cette encyclique écrite à plusieurs mains, il y a des paradigmes bien contradictoires.

Pendant ce temps-là, le projet Open Worm travaille à recréer artificiellement le comportement de l’ascaris commun, un petit ver non parasitaire ; la simulation de sa structure neuronale permet déjà de contrôler un robot Lego ! Ce n’est évidemment qu’un prélude puisque le projet européen Human Brain a pour objectif de mieux comprendre le cerveau mais de l’homme cette fois et, à nouveau, de le simuler. Chez Google, Ray Kurzweil travaille à l’hybridation de la pensée biologique et non biologique ; il s’agit d’une étape vers cette réalité humaine augmentée qu’est le transhumanisme. A Guangzhou, en Chine maintenant, l’équipe du Dc Huang, de Sun Yat-Sen University a annoncé avoir tenté de modifier le génome d’embryons humains. On le voit, pour qui veut une écologie intégrale, il y a un énorme travail pour tenter de définir ce qu’est un être humain en tenant compte des nouvelles découvertes scientifiques. Il y a un enjeu extraordinaire à comprendre ce qu’est réellement la liberté alors qu’on découvre de façon de plus en plus précise le chemin de la décision dans le cerveau humain. Comme dans notre relation à la nature, il y a des limites à ne pas dépasser car elles mettent en danger l’homme lui-même et il est indispensable d’apprendre à les repérer. Car, à l’arrivée, à quoi sert de protéger la planète s’il elle finit pas être peuplée de cyborgs qui obéissent au doigt et à l’œil à un pouvoir qui est directement connecté sur leur cerveau !

Saint François d’Assise a délivré les habitants de Gubbio de la fureur d’un loup qui dévorait bêtes et gens. Il l’a fait d’une manière étrange en instaurant, entre le loup et les habitants de la ville, quelque chose qui ressemble davantage à une rançon qu’à un contrat ! S’il joue sur plusieurs registres, le pape François n’en pactise pas moins avec les loups malthusiens qui rançonnent la population d’impôts nouveaux – même s’il ne partage pas l’idée qu’il y a trop d’hommes sur terre. Il en oublie même qu’il y a des loups bien plus dangereux qui ont pour projet de dévorer l’homme de l’intérieur en le privant de sa liberté et donc de sa capacité à louer le créateur !

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La redevance audiovisuelle, le dilemme fiscal du gouvernement

Le gouvernement envisage d’élargir la redevance aux propriétaires d’écrans autres que télévisuels. Une mesure qui pourrait lui éviter d’augmenter de manière trop «visible» cet impôt.

Un retour à la théorie économique dans LeFigaro.fr du 25 août 2015

Tout était clairement écrit dès 2007 sous le titre : « la redevance audiovisuelle peut-elle être assimilée à une vente liée ? », Débat 2007 .

 

Croissance zéro : «Ce chiffre est une douche froide»

Les économistes Gérard Thoris et Jacques Delpla décryptent la croissance nulle en France au deuxième trimestre ainsi que la déprime de la consommation des ménages et de l’investissement des entreprises.

En parallèle avec Jacques DELPLA. Lire l’article sur LeFigaro.fr du 14 août 2015

 

Le Grexit évité mais pour combien de temps… Puisque la dette grecque n’est pas remboursable ?

Les débats autour de le crise grecque portent essentiellement sur la dette, considérée par l’Europe comme étant un problème en soi. Pourtant, une grille de lecture plus pragmatique s’attarderait au vrai problème qu’elle implique : sa solvabilité.

Publié le 14 juillet 2015 sur Atlantico.fr

La Grèce est au bord du gouffre. Elle est incapable d’honorer les échéances de sa dette, d’abord au FMI depuis le 30 juin dernier ; ensuite auprès de ses autres créanciers. Elle vient d’obtenir une aide évaluée autour 75 milliards d’euros. Est-ce vraiment la fin du « Grexit ».

On voudrait être optimiste qu’on ne le peut pas. Les économistes de tous bords ont rendu les armes et ce sont les politiques qui prennent les décisions, comme s’il n’existait pas de « lois de l’économie ». L’aide des créanciers s’impose lorsqu’il s’agit d’une crise de liquidités. C’est d’ailleurs pour cela que le FMI a été créé, suite à la faillite du Kreditanstald de Vienne, en mai 1931. Elle ne peut venir à bout d’une crise de solvabilité.

Que la Grèce soit en crise de solvabilité ne fait aucun doute. L’effet boule de neige de la dette y bat son plein. En 2015, le taux d’intérêt implicite sur la dette est assez faible (2,4 %) mais, malgré les plans de restructuration, il porte sur 180 % du PIB. Donc les intérêts sur la dette représentent 4,3 % du PIB. En face, la croissance prévisionnelle y est, au mieux, nulle. Donc, le simple service des intérêts de la dette oblige à diminuer le niveau de vie des grecs de 4,3 % en 2015. A la fin de l’année, ils seront contents : ils auront payé les intérêts sur la dette mais seront toujours aussi endettés !

La proposition dont se réjouit le Président François Hollande est celle d’un reprofilage de la dette. En termes plus traditionnels, il s’agit d’un moratoire, sous la forme d’un allongement de la durée de maturité des prêts. A supposer que l’Eurogroupe l’accepte, ce qui n’est pour l’heure qu’une hypothèse, il s’agit simplement de desserrer un peu l’étreinte pour que le condamné souffre plus longtemps. Pour qu’il en soit autrement, il faudrait que la baisse du montant des échéances, intérêts et principal, soit telle qu’elle génère un mouvement de croissance conséquent.

La clé de la solvabilité, on l’aura compris, c’est une croissance nominale supérieure au montant des intérêts à payer en pourcentage du PIB. En supposant que, pour une fois, les prévisions de la Commission de Bruxelles s’avèrent exactes, la croissance de 2016 serait de 3,66 %. Il faudrait donc que le poids des intérêts soit ramené en dessous de ce chiffre pour que la Grèce puisse commencer à rembourser le principal. Et encore, cela suppose que les fruits de la croissance ne bénéficient pas à la population, mais seulement aux créanciers !

Alexis Tsipras signe aujourd’hui ce qu’il refusait d’avaliser hier, après un référendum qui lui a été particulièrement favorable. Est-ce que les conditions posées par l’Eurogroupe sont acceptables par les Grecs ?

Amusons-nous un instant. Certaines des conditions imposées à la Grèce pourraient être suggérées à la France. Il en est ainsi des « mesures pour améliorer la durabilité du système des retraites » ou le respect des dispositions des traités européens, par la mise en place de coupes quasi automatiques dans les dépenses en cas d’excèdent budgétaire, ou encore la privatisation du réseau de transports électrice ou la réforme du marché du travail !

Il y aurait beaucoup à dire, ligne par ligne, sur ces conditions. Mais il devrait être clair désormais que le déficit budgétaire est une atteinte à la justice intergénérationnelle lorsque la croissance est en panne. Les conditions imposées à la Grèce sont donc « de raison », même si elles ne sont pas raisonnables.

La vérité des chiffres est en effet très cruelle. On ne sait pas encore ce que va représenter l’augmentation de la TVA ni celle de l’impôt sur le revenu. Par contre, la Grèce est supposé privatiser des actifs et utiliser la moitié des sommes ainsi obtenues (évaluées à 25 Mrds€) pour recapitaliser les banques ! Le même accord prévoit que la directive européenne sur le renflouement des banques soit transposée dans la législation grecque. Cela veut dire que la prochaine crise bancaire sera à la charge au moins partielle des déposants.

L’efficacité du plan repose plus largement sur le fait que l’augmentation de la TVA et des impôts directs n’entraîne pas une diminution de la demande d’une part, un accroissement de l’économie souterraine d’autre part. On s’en doute, rien n’est moins sûr !

Quelles solutions alors peuvent découler de ce changement de focale ?

En bonne économie, une crise de solvabilité passe par la case « faillite » et apurement des dettes. C’est le cas pour n’importe quelle entreprise qui n’a pas été capable de valoriser son capital. L’idée que les Etats sont éternels et que les contribuables sont taillables et corvéables à tous les âges de la vie est une fiction lorsque la croissance et/ou l’inflation ne sont pas au rendez-vous.

La Grèce ne peut sortir de l’euro sans répudier ses dettes. Une dépréciation de la drachme se traduirait en effet immédiatement par une augmentation du poids de la dette exprimée en euros au-delà de l’insoutenable. C’est ce que tout le monde craint, dans le monde bancaire comme dans le monde politique qui lui est lié. L’attachement des Français à éviter le Grexit tient à la valeur d’exemple que cette première sortie engendrerait. A défaut de sortir de l’euro, que pourrait-on faire ?

Voilà cinq ans que nous défendons l’idée d’une remise des dettes publiques pour l’ensemble des pays de la zone euro. Elle permettrait de remettre les compteurs à zéro en portant les dettes sans collatéraux à l’actif de la Banque centrale. Au passif, on pourrait créer une ligne fictive « contribution de la BCE à la résolution de la grande crise européenne du XXI° siècle ». Le bilan serait équilibré. Fiction ? Oui. Mais a-t-on oublié que la contrepartie de la création monétaire, c’est la capacité de croissance économique qu’elle génère. L’opération de rachat de titres publics lancée par Mario Draghi au début de l’année 2015 relève quand même partiellement de cette logique pour les obligations publiques arrivant à échéance. Notre programme ne porte pas sur la marge, le renouvellement des prêts, mais sur la moyenne. Evidemment, l’opération initiée par Mario Draghi permet seulement d’assurer qu’il y aura un prêteur national en dernier ressort : la Banque centrale nationale. Elle ne résout pas le fonds du problème. Or, de manière très explicite, le protocole d’accord avec la Grèce ferme toute porte dans la voie d’une remise des dettes : « le sommet de la zone euro souligne que l’on ne peut pas opérer de décote nominale sur la dette ». C’est donc l’impasse.

Si nous pouvions arrêter de faire des prêts pour essayer de solder le passé, nous sauverions l’idéal de l’Union européenne. Cela nous mettrait parallèlement dans de bonnes conditions pour construire l’avenir

La fin de la monnaie manuelle ?

Avez-vous déjà pensé à vous faire implanter une puce intradermique ? Ce serait un nouveau moyen très pratique de « payer de sa personne ». Est-ce sans inconvénient ? A vous de réfléchir !

Publié dans La Croix du 29 juin 2015

La monnaie est un pouvoir. C’est un pouvoir de choix. C’est un pouvoir d’achat.

L’expérience commune est que, pour disposer de pouvoir d’achat, il faut commencer par offrir ses services sur le marché du travail et en retirer une rémunération. Ici, la monnaie est acquise en contrepartie d’une mise au service de la collectivité des talents reçus et exploités. Ensuite, chacun est libre d’en faire ce qu’il veut : c’est son pouvoir de choix.

En tant que pouvoir de choix, la monnaie oriente toute l’activité économique. Ce sont les votes exercés par les consommateurs avec leurs euros qui déterminent ce qui sera produit, en quelles quantités et, indirectement, à quel prix. Les innovations technologiques elles-mêmes sont tout entière suspendues à son verdict !

Mais la monnaie cache un autre pouvoir : celui de sa mise en circulation. Lorsque la monnaie était un métal précieux, le bénéfice de la mise en circulation monétaire allait à celui qui le découvrait. Les pouvoirs publics se contentaient d’y mettre leur effigie. Lorsque la monnaie est devenue fiduciaire (les billets), les bénéfices de la création monétaire allaient aux banques qui émettaient ces billets. Enfin, avec la monnaie scripturale (qui circule par les chèques et les cartes bancaires), les bénéfices de la création monétaire vont à toutes les banques dites de second rang (BNP Paribas, LCL, Société générale, etc.). Mais il faut noter que, dans les deux derniers cas, la monnaie était créée en contrepartie de nouvelles activités économiques. Comme le disait l’économiste français François Simiand : une des fonctions essentielles de la monnaie, « est de constituer une anticipation, disons mieux, une réalisation dès maintenant actuelle d’une richesse future ».

Aujourd’hui, tout cela est profondément remis en cause.

Les Etats sont endettés et leurs obligations sont achetées par les banques. Depuis le programme de rachat des obligations publiques par la Banque centrale européenne (quantitative easing), le déficit budgétaire est financé par la création monétaire. Mais il ne s’agit pas de préparer le futur, il s’agit d’essayer de solder les dépenses du passé. Comme les intérêts sur ces opérations sont extrêmement faibles, et dans l’hypothèse où il ne remboursera pas – et comment ferait-il ? – on peut dire que le bénéfice de la création monétaire revient à l’Etat.

Maître de la création monétaire, l’Etat vise au contrôle de la circulation monétaire. Le système socio-fiscal a été conçu au bénéfice des citoyens. Il est aujourd’hui une formidable machine à distribuer du pouvoir d’achat ici, à en retirer là. Ce n’est jamais dans la moyenne qu’il faut juger d’une politique socio-fiscale, mais dans la multitude des exemptions qui accompagnent des situations particulières. Qui pourrait, même en utilisant les services des moteurs de recherche, faire la synthèse de toutes les transformations marginales du système socio-fiscal français, ne serait-ce que depuis 2012 ? Entre le principe de la neutralité fiscale et l’exigence de justice sociale, le curseur s’est largement déplacé. Il est vrai qu’un ministre du budget cesserait d’exister s’il souhaitait inverser la tendance !

Cependant, la concurrence entre les monnaies fait que l’on peut encore échapper aux prélèvements obligatoires en utilisant la monnaie manuelle plutôt que scripturale. Le rêve de tout homme politique est d’élargir son pouvoir sur la circulation monétaire en interdisant la première et nous avançons à grands pas dans cette direction. La France travaille sur les deux extrêmes : en demandant que les billets de 500€ soient supprimés et en autorisant le paiement par carte bancaire en dessous de 15€. Le Danemark devrait interdire prochainement tout paiement en espèces et la plupart des pays s’orientent dans des voies similaires. Bien entendu, pas question de parler de pouvoir sur la circulation monétaire ; le motif officiel était hier de lutter contre la fraude fiscale ; on y ajoute aujourd’hui la lutte contre le terrorisme.

Pourtant, considérons un instant le monde qui se dessine derrière cette transformation de la monnaie qui en fera une chose totalement virtuelle.

Le paiement est totalement dématérialisé, mais il est totalement identifié. Toutes les dépenses quelles qu’elles soient laissant désormais une trace électronique, la liberté d’aller et venir est désormais une liberté sous surveillance. Qui dira qu’il n’y a aucun risque que, demain, elle devienne une liberté sous contrôle ?

La liberté de choix est dans la nature même de la monnaie. Qui dira que, demain, elle ne soit sous contrôle électronique ? Ainsi, il devient possible d’interdire à un jeune de moins de 18 ans de payer ses achats d’alcool avec sa carte bancaire ou son Smartphone. Evidemment, il devient également possible d’interdire d’acheter un spectacle ou une publication considérés comme attentatoires à quelque grand principe. Hier, les principes étaient intangibles ; aujourd’hui, ils dépendent d’une majorité politique. Qu’y a-t-il au bout du bout de leurs mutations ?

Le pouvoir d’achat lui-même pourrait être bloqué à un certain niveau de dépense par personne, soit globalement, soit par produit. Est-ce un cauchemar ? Le rapport Meade, paru en 1978, préconisait un impôt sur la consommation dont la mise en œuvre supposait, justement, la suppression de la monnaie manuelle. Après quoi, ce n’est plus qu’une question de taux.

Encore faut-il s’assurer de la cohérence entre la personne physiquement présente et le titulaire effectif du moyen de paiement. Avec la puce intradermique, la boucle est bouclée : votre moyen de paiement, c’est votre personne même. Pratique, non ?

 

 

Les « digital natives » : une vraie rupture sociétale. Le sociologue Ferdinand Tönnies en contrepoint.

Le système des Tweets et plus généralement de « profil » Internet de type Facebook ou Google+ se rapproche de la « communauté d’amitié » décrite à la fin du XIX° siècle par Ferdinand Tönnies… Est-ce la fin des grandes institutions ? Une nouvelle étape dans l’étude des « digital natives ».

Lire la suite sur Prés@je n° 26, juin 2015

Du Smic jeunes à la prime d’activité

Cela fait maintenant plus de quarante ans que la France essaie de sortir de la difficulté d’un salaire minimum trop élevé pour certaines catégories de personnels. Une partie des jeunes sans véritable formation sont dans ce cas. Une solution serait d’ajuster leur salaire à leur productivité, ce que concède Pascal Lamy. François Hollande préfère leur donner une prime d’activité. Le prix du travail est donc un peu plus déconnecté encore de la réalité économique et personne ne pourra revenir en arrière !

Publié dans La Croix du 1er juin 2015

Le 2 avril 2014, Pascal Lamy, ancien directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, déclarait sur La Chaîne Parlementaire : « Je sais que je ne suis pas en harmonie avec une bonne partie de mes camarades socialistes, mais je pense qu’à ce niveau de chômage, il faut aller vers davantage de flexibilité, et vers des boulots qui ne sont pas forcément payés au smic ». Un an plus tard, le 19 avril, le Président François Hollande annonce une « prime d’activité » dont les jeunes de 18 à 25 ans pourront bénéficier. Même si, a priori, cette mesure est neutre pour les entreprises, il est évident qu’elle enterre l’idée même qu’il puisse y avoir un salaire minimum spécifique aux jeunes. Quant à connaître ses conséquences, rien n’est évident et on peut s’essayer à quelques hypothèses.

L’argument en faveur d’un ajustement du salaire minimum au pouvoir d’achat des ménages est relativement simple. L’employeur ne peut verser en salaire que ce que le consommateur final accepte de payer. S’il n’y a pas d’achat, il n’y a pas d’emploi. On peut toujours essayer d’éduquer le consommateur pour qu’il accepte de payer plus cher un bien ou un service. Mais il suffit de voir quel pourboire les Français acceptent de donner dans les pays où il est laissé à sa libre appréciation pour comprendre que leur bienveillance est généralement très limitée. Les jeunes entrent dans le cadre de cette analyse si et seulement si ils sont peu formés et/ou que leur productivité est faible. Même si Martine Aubry « n’y croit pas » (Le Monde, 19 juin 1991), la modération du Smic est normalement favorable à l’emploi.

« Le smic jeunes, nous y sommes bien sûr fermement opposés » a répliqué Mme Najat Vallaud-Belkacem, alors ministre de la Jeunesse et des sports, lorsque Pierre Gattaz a rebondi sur l’idée avancée par Pascal Lamy (15 avril 2014). C’était oublier beaucoup de choses. En particulier, on peut considérer que les contrats en alternance, les stages et les emplois d’avenir sont trois systèmes qui sont destinés à favoriser l’apprentissage pour les jeunes. Or, ils dérogent effectivement à la règle du salaire minimum.

L’opposition de principe de Mme Vallaud-Belkacem surfe donc sur ces faits sans jamais les rencontrer. A supposer qu’elle ne soit pas pur clientélisme, quelle est donc la logique de la future prime d’activité, lorsqu’elle est étendue aux jeunes ? Selon toute vraisemblance, elle constitue une étape dans l’élargissement de l’accès des jeunes aux avantages du revenu minimum d’insertion. C’est un débat ancien qui revient périodiquement sur le devant de l’actualité depuis la création du RMI en 1988. En 1992, René Teulade, ministre des Affaires sociales et de l’intégration du Gouvernement Bérégovoy se refuse à accorder le FMI aux moins de 25 ans. En 1997, au nom des Verts, Alain Lipietz la demande sans plus de succès. Finalement, ce sera Nicolas Sarkozy qui fera le premier pas dans ce sens quand, le 1er septembre 2010, il accordera le RSA aux jeunes de moins de 25 ans pour peu qu’ils aient travaillé l’équivalent de deux ans au cours des trois dernières années.

Logiquement, même si cela est difficile à prouver avec des arguments statistiques, ce RSA-socle de 541€ entre en concurrence avec un emploi à temps partiel payé au Smic. La prime d’activité a donc un effet incitatif pour contrer l’effet désincitatif des revenus sociaux. François Hollande le dit lui-même : « On va leur donner une prime supplémentaire pour que ça puisse être avantageux de travailler ». A ce moment du discours politique, la prime d’activité est conçue pour les jeunes ayant une activité professionnelle. La question qui va très vite se poser consiste à savoir comment l’étendre au plus grand nombre.

La chose fut vite faite. Initialement, et encore dans le « projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi » tel que publié le 22 avril 2015, il est exactement écrit : « les étudiants ou les apprentis ne sont pas éligibles à la prime »[i]. Dès le lendemain, suivant les « souhaits » du Président François Hollande, le site du Ministère du travail fait savoir que « la prime d’activité serait élargie aux étudiants salariés et aux apprentis travaillant assez pour toucher au moins une rémunération de l’ordre de 80 % du SMIC ». Cette fois, l’argument relève expressément du pouvoir d’achat des jeunes. Comme l’argent distribué ici est prélevé là, cela n’a aucun impact sur l’activité macroéconomique et donc sur l’emploi.

En conclusion, on observe trois choses. Premièrement, le discours politique est certainement à géométrie variable, mais le cap à gauche est donné et poursuivi avec une belle constance sur la longue durée. Ce cap, évidemment, est la socialisation des revenus.

Deuxièmement, alors que la question posée il y a vingt ans déjà, il y a un an encore, était de savoir s’il fallait instaurer un niveau de Smic particulier pour les jeunes, la solution socialiste a été de créer une prime pour les jeunes payés au Smic, c’est-à-dire d’abonder sur une rémunération déjà trop élevée pour le marché.

Enfin, il est vraisemblable que les fausses inscriptions d’étudiants vont diminuer puisque, comme étudiant, à 25 % du Smic on ne touche rien ; comme salarié, au même niveau de rémunération, on touche 185€ mensuels de prime ! A l’inverse, les moins de 25 ans qui gagnent plus de 1,4 Smic ne toucheront rien. Après tout, ils n’avaient qu’à pas réussir ni leurs études, ni leur insertion professionnelle !

« Il n’y a pas d’assistance dans ce pays » : quelques exemples concrets à l’attention de Marisol Touraine

En réponse à Nicolas Sarkozy, la ministre de la Santé a déclaré qu’en France « il n’y a pas d’assistanat ». Une vision contredite par la réalité de l’Etat providence, qui propose une prise en charge à la fois excessive et démotivante à travers la CMU, le RSA, les primes pour l’emploi…

En parallèle avec Philippe CREVEL et Jean-Yves ARCHER

Pour les abonnés, l’article complet est sur Atlantico.fr du 14 avril 2015

A défaut de programme, on peut toujours chercher des marqueurs idéologiques. L’assistanat en est un. L’idée que des Français puissent jouer délibérément avec le système de protection sociale est un facteur de clivage dont la gauche se régale et qui fait mouche à chaque fois. Evidemment, on a les informations que l’on veut avoir et la mémoire de ce qui sert à son projet. Il est difficile d’être complètement objectif sur le sujet mais, du moins, on peut essayer d’avoir quelques repères.

  1. Le revenu minimum d’insertion

Lorsque qu’il a été créé, le revenu minimum était lié à l’insertion. Cela signifie clairement qu’il ne relevait pas de l’assistance, mais qu’il était attribué en contrepartie d’un service rendu à la société. Dans la logique de l’époque, au moins comme elle s’affichait, il s’agissait d’éviter que des personnes puissent perdre l’habitude de l’insertion sociale qui permet le travail. Dans les faits, l’exigence d’une action d’insertion, comme condition nécessaire pour bénéficier du revenu minimum, a été limitée par la capacité des collectivités territoriales, voire des associations, à proposer des activités d’insertion. De plus, une manifestation d’envergure (1000 personnes !) a été organisée à Perpignan parce que le Président du Conseil général, Christian Bourquin, voulait donner un caractère contraignant à cette obligation[i]. C’était oublier que, dans l’ordre marchand, il est anticonstitutionnel d’imposer quoique ce soit à quelqu’un contre sa volonté. Bref, le « i » de insertion étant contraire au principe supérieur de liberté individuelle, il était impossible de lier le revenu minimum à une contrepartie. Peut-être parce que les choses se passent entre gens de gauche, malgré cela, bien entendu, personne n’est considéré comme assisté en France.

Qu’à cela ne tienne, Nicolas Sarkozy Président revient sur le sujet. Comme il est très consciemment à la recherche d’un consensus transpartisan, il confie la question du RMI à Martin Hirsch, Président de l’Union centrale des communautés d’Emmaüs. Pour essayer de se dépatouiller du sujet, celui-ci crée une marche supplémentaire dans le processus. Le RMI devient RSA-socle – soit « revenu de solidarité active ». A dire vrai, on ne sait pas si ce sont les bénéficiaires du RSA qui sont actifs ou bien les actifs qui sont solidaires des bénéficiaires de ce minimum social. Il fut vaguement question de fusionner l’ensemble des minima sociaux mais, électoralisme oblige, personne n’a vraiment souhaité essayer mettre de la cohérence dans cet ensemble hétéroclite. Par contre, pour les foyers avec revenu d’activité, le RSA devenait « chapeau » ou « d’activité »[ii]. Autrement dit, le revenu minimum devient inconditionnel. Les bénéficiaires qui acceptent un travail ont une « prime » pour éviter qu’ils ne perdent de l’argent à travailler. Signalons que, jusqu’à cette année 2015, la prime pour l’emploi n’avait pas été fusionnée avec le RSA-chapeau !

  1. Le salaire de réservation

Il est vraisemblable qu’un citoyen normalement constitué ne voit aucun inconvénient à ce que la société vienne en aide à un autre citoyen en situation de détresse. Sur le principe, globalement, tout le monde est d’accord. Là où le bât blesse, c’est évidemment quand il s’agit de chiffrer le niveau jusqu’où il faut aider « un autre citoyen en situation de détresse ». Il y a beaucoup de paramètres pour éclairer cette décision et l’un des plus significatifs est certainement la possibilité de trouver un travail. Avec les taux de chômage que nous connaissons en France, c’est un défi difficile à surmonter, surtout pour les personnes sans qualification. Si un travail se présente malgré tout, il est à craindre qu’il s’agisse d’un travail à temps partiel, vraisemblablement sans qualification, rémunéré au niveau du SMIC. Alors, inévitablement, la question du coût d’opportunité de ce travail se pose. Certes, vous pouvez toujours dire que la personne en question aura « le pied à l’étrier », qu’elle renouera avec les attitudes qui la rendront employable – dont les contraintes horaires, qu’elle pourra se constituer un réseau, même modeste, pour rebondir. Mais, selon toute vraisemblance, elle sortira sa calculette imparfaite ou, sur un coin de la nappe, elle additionnera rapidement les moins-values en termes de prestations sociales qu’elle devra supporter si elle accepte de travailler. La durée de réservation cherche à mesurer le nombre d’heures de travail qu’il faut effectuer chaque semaine pour atteindre le niveau des prestations sociales obtenues sans travailler. Denis Anne et Yannick L’Horty ont montré que, « en 2007, en prenant en compte les transferts nationaux légaux, une personne isolée devait travailler un peu plus de 18 heures par semaine en étant rémunérée au Smic pour obtenir un revenu disponible définitivement supérieur à celui qu’elle obtenait sans revenu d’activité. Cette durée de réservation passait à un peu plus de 25 heures de Smic net si l’on prend également en compte la moyenne des droits connexes nationaux et locaux accessibles à une personne isolée »[iii]. A chacun de voir s’il est vraiment attractif de travailler 26 heures pour avoir un léger bonus par rapport à l’inactivité ! A chacun de voir s’il s’agit d’un choix « pour la paresse », comme on entend dire, ou d’un « calcul rationnel ».

  1. Pour une déclaration citoyenne

Il reste à essayer de mesurer dans quelle mesure les bénéficiaires des minima sociaux sont ou non conscients de l’effort de solidarité nationale dont ils bénéficient. Il est vraisemblable que non pour une raison très simple : même à ces niveaux de prestations sociales, il reste bien difficile de « joindre les deux bouts ». Et puis, plus prosaïquement encore, personne ne leur demande de faire l’inventaire des prestations sociales dont ils bénéficient. Pour y voir plus clair, on pourrait donc imaginer de demander à chaque citoyen de procéder à une déclaration annuelle de tous les avantages sociaux dont il ont bénéficié dans l’année[iv]. Cette déclaration pourrait avoir lieu au moment où les citoyens déclarent leur revenu d’activité. Les différentes instances qui distribuent des avantages sociaux seraient dans l’obligation d’en faire la déclaration au Ministère de l’économie et des finances, qu’il s’agisse de prestations financières ou de prestations en nature. On pourrait inclure dans ces dernières la différence entre le prix d’un logement social et le prix de marché d’un logement équivalent dans le même quartier ; on y introduirait les repas gratuits à la cantine, le transport gratuit là où il existe, etc. Evidemment, ces déclarations seraient strictement confidentielles, sans publicité aucune. Mais elles pourraient être demandées par toutes les associations dont la mission est, justement, de soulager la misère au-delà de ce la société fait dans ses instances nationales et locales. On peut imaginer qu’une telle déclaration citoyenne augmenterait la conscience que les gens ont de l’effort que les autres font pour eux. S’ils n’avaient pas cette délicatesse, alors il ne resterait plus qu’à valider la solution aujourd’hui entrevue par l’Etat du Kansas[v] : mettre une tutelle sur les revenus sociaux pour qu’ils soient dépensés de la manière la plus adéquate par les individus qui en bénéficient ! Mais, là encore, il se trouvera vraisemblablement un collectif pour déclarer cette pratique anticonstitutionnelle !

[i] http://www.liberation.fr/politiques/1998/09/21/a-perpignan-les-rmistes-echappent-au-travail-obligatoire-l-idee-avait-ete-lancee-par-le-president-du_246240

[ii] http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F502.xhtml

[iii] http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ES429F.pdf

[iv] http://www.debat2007.fr/blog/index.php?2007/03/02/401-pour-une-declaration-citoyenne

[v] http://www.liberation.fr/monde/2015/04/07/le-kansas-veut-priver-les-pauvres-de-cinema-et-de-piscine_1236599

Incohérence temporelle

Après avoir sévèrement ponctionné les profits des entreprises depuis 2012, le gouvernement s’aperçoit que leur trésorerie est exsangue. On pourrait imaginer qu’il décide de diminuer les impôts. Mais ce serait contraire à l’un des principes fondamentaux du pouvoir politique en France, aujourd’hui : l’argent appartient par principe à l’État ; son usage privé n’est que concédé. La formule peut paraître exagérée ; mais c’est l ‘asymptote que l’on voit le mieux la direction de la courbe, ici des événements.

Publié dans La Croix du 13 avril 2015

Dans le cycle conjoncturel, le moment-clé de la reprise est celui où l’investissement redémarre. C’est lui, en effet qui va confirmer le changement de cap en amplifiant le mouvement de reprise de la consommation. C’est bien le moment où nous nous trouvons. Si l’on fait un arrêt sur image à la fin du premier trimestre 2015 et que l’on extrapole les résultats ainsi obtenus sur l’ensemble de l’année, on obtient pour 2015 une croissance « acquise » de 0,8 % stimulée par la demande de consommation des ménages (1,3 %) mais freinée par l’investissement des entreprises (-0,2 %), des ménages (principalement le logement à -4 %) et des administrations publiques (-2,2 %). On comprend la préoccupation du Président François Hollande et son engagement à faire bouger les lignes ! Pourtant, force est de constater que la situation est, pour une part substantielle, de son fait. Il ne fait qu’essayer de corriger les conséquences logiques de ses décisions. Il s’agit d’une manifestation supplémentaire d’incohérence temporelle, où la puissance publique prend des décisions contradictoires à deux moments différents du temps. A zigzaguer ainsi, il est peu probable que l’on avance beaucoup vers la cible de la croissance et de l’emploi. Qu’on en juge !

Lorsque, en 2012, l’on croyait encore possible de ramener en un an le déficit budgétaire de 4,5 à 3,0 % du PIB à fin 2013, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault avait décidé de mettre les entreprises à contribution pour un tiers de cet objectif, soit 10 Mrds€. Impossible de rappeler le poème à la Prévert des mesures fiscales qui ont été prises. Cependant, il est préférable de savoir d’avance que celui qui verse le montant de l’impôt n’est pas nécessairement celui qui en subit le poids. Au moment du prélèvement, ces impôts pèsent sur la trésorerie des entreprises ; avec le temps, le contribuable effectif dépend des possibilités de l’entreprise de reporter ces prélèvements sur d’autres acteurs. Les véritables payeurs peuvent être les fournisseurs (pression à la baisse des prix d’achat), les clients (hausses des prix), les salariés (moindre progression des salaires) ou l’emploi (si les investissements de capacité sont reportés). Il faut croire qu’aucun des trois premiers transferts ne fut possible puisque l’on parle actuellement de mettre en œuvre un dispositif fiscal pour améliorer, justement, la trésorerie des entreprises. Il serait surprenant que ce dispositif fiscal ne soit pas conditionnel et donc, l’entreprise sera une fois de plus pilotée par les fonctionnaires de Bercy. S’ils jouent le jeu, les dirigeants se transformeront en chasseurs de prime. A priori, on peut penser que ce n’est pas le métier qu’ils ont choisi !

Avec la crise financière, les normes prudentielles ont été resserrées. Ici, la responsabilité ne relève en rien des gouvernements français sauf qu’il leur revenait d’anticiper les conséquences de ces nouvelles régulations internationales. L’objectif explicite était de contrôler la prise de risque des institutions financières ; l’objectif implicite était de favoriser la détention d’obligations publiques par les compagnies d’assurance. Ainsi, pour pouvoir acheter une obligation d’entreprise à dix ans, la compagnie d’assurance devra détenir trois fois plus de fonds propres que pour une obligation à trois ans. Le financement à long terme de l’entreprise est donc mécaniquement pénalisé. Qu’à cela ne tienne, le gouvernement vient d’y penser. Il va créer un fonds de 500 millions à disposition des assurances pour des prises de participation dans les entreprises. Evidemment, on peut poser immédiatement trois questions : de où viendront ces fonds ? Quels seront les critères de distribution ? Est-ce que les entreprises veulent vraiment diluer le pouvoir de décision économique en acceptant une prise de participation quasi-publique dans leur capital ? Décidément, chassez le socialisme d’État par la porte, il rentre par la fenêtre !

Enfin, la chasse aux fonds propres est ouverte en France depuis l’instauration de l’Impôt sur les grosses fortunes (1982) et les augmentations de salaire supérieures aux progrès de productivité. Son résultat est connu : depuis 10 ans, la part des investissements réalisés sur fonds propres (taux d’autofinancement) est toujours inférieure à 100 % en France alors qu’elle est toujours supérieure à 100 % en Allemagne. Si l’on interroge les économistes sur les leviers de redressement du taux d’autofinancement, ils parlent de freinage du salaire réel ou de progression de la productivité – qui suppose, justement d’investir. Si l’on pose la même question à un gouvernement en France, il répond par l’identification de « prêts cautionnés par la puissance publique » à des quasi-fonds propres. C’est ce que propose à nouveau François Hollande avec les prêts de développement des entreprises gérés par la Banque publique d’investissement (BPI). La différence entre de véritables fonds propres, à la discrétion effective du dirigeant et de quasi-fonds propres, à la discrétion d’une banque publique, c’est le temps passé à monter le dossier, à justifier chacun des paramètres du projet de développement, à expliquer que l’on est absolument pas sûr qu’investissement rime avec emploi !

On le voit, si la direction est bonne, le chemin est tortueux. S’il est une ligne droite, elle est implicite. C’est celle qui consiste à concentrer les leviers de la décision économique entre les mains de la puissance publique. Et dire qu’il en est qui parlent de « cadeaux aux patrons »

Adam Smith et son « spectateur impartial » à l’heure de Facebook

Les réseaux sociaux sont les fenêtres du village d’autrefois. Les « digital natives » y épanchent leur vie au fil des heures et ils attendent avec impatience la bénédiction de la microsociété qu’ils se sont choisie sous la forme statistique d’un « like » bienveillant… Gérard Thoris propose une relecture des deux chefs d’œuvre d’Adam Smith pour comprendre les ressorts de la vie en société à l’heure d’internet.

Lire la suite sur Prés@je, n° 25, favrier-mars 2015